Une haie vive diversifiée apporte gîte et nourriture pour les insectes et les oiseaux.
Mon beau thuya, roi des jardins
« Les Suisses rêvent toujours d’avoir une maison » : telle est la conclusion d’une étude publiée récemment par plusieurs quotidiens romands. « Une maison et un jardin entouré d’une haie dense pour se protéger des regards » pourrait-on ajouter lorsque l’on se balade dans les quartiers de villas de la région. Une haie, de nombreux propriétaires en veulent une, et pour toute une série de bonnes raisons.
La haie, c’est ce qui nous autorise à profiter de la terrasse sans être obligé de saluer les voisins. C’est ce qui nous isole de la rue lorsque nous prenons le soleil en costume de bain, allongé sur une chaise longue. C’est aussi ce qui nous permet de partager une grillade entre amis ou en famille, sans avoir l’impression que la moitié du quartier participe à ce moment d’intimité. Bref, lorsque l’on est dans son jardin, la haie nous offre une véritable bulle d’oxygène.
Mais il faut bien admettre que le sentiment n’est pas tout à fait le même lorsque l’on se promène dans le quartier, comme par exemple un ami qui vous rend visite : « Alors depuis l’arrêt de bus, tu longes les deux allées de thuyas jusqu’au carrefour, puis c’est à gauche le long des thuyas sur 300 mètres et puis tu verras un jardin avec une haie de laurelle et c’est ici… ». Il n’est pas sûr qu’il en garde un souvenir inoubliable. Et la faune sauvage risque bien d’être de son avis.
Quitte à délimiter le contour de son jardin, pourquoi choisir systématiquement les mêmes espèces vertes, monotones et sans intérêt pour la faune locale ? Pourquoi au contraire ne pas opter pour une haie vivante, diversifiée, qui évolue au fil des saisons, produit des fleurs et des fruits pour nourrir les insectes, les oiseaux et petits mammifères ? Pourquoi souhaiter disposer de son propre jardin si c’est pour qu’il ressemble comme une goutte d’eau à celui de son voisin ?
Si la haie répond à un besoin légitime des propriétaires de préserver leur intimité, elle participe aussi grandement à définir l’ambiance d’un quartier. Et dans une période où l’érosion de la biodiversité est un phénomène démontré par la communauté scientifique, où plus d’un tiers des espèces connues en Suisse est menacée d’extinction, chacun devrait se demander si fusain, sureau et églantier ne remplaceraient pas avantageusement thuyas, laurelles ou cyprès. Être bien chez soi, oui, mais en faisant un geste pour la nature, c’est encore mieux.